Sorti en 1946, ce classique est un pur produit d’après-guerre. Destinés à une clientèle aisée mais pas forcément riche, le 140 puis le 120 permirent également à nombre de pilotes démobilisés de continuer à voler pour le plaisir. Produits à près de 8000 exemplaires, ces petits avions solides et performants contribuèrent à la réussite de Cessna. Aujourd’hui encore, cette série conserve l’aval de la gent pilote.

Marc-Julien Gauthier aux commandes de son splendide Cessna 140A, immatriculé CF-FVO (année 1951), basé à CYRQ.

Transports Canada répertorie 210 Cessna 140, toutes séries confondues. Sur le nombre, 162 sont des 140 standards, 30 sont des modèles X (appareils déclassés en Owner Maintenance ou maintenance par le propriétaire) et 18 des A. Cette dernière version, produite de 1949 à 1951, ne représente qu’un faible pourcentage de la production globale mais demeure certainement la plus aboutie. Avec ses ailes entièrement métalliques, ses mono-haubans, son moteur de 90 ch optionnel (ou 85 ch de série) et son atterrisseur principal avancé (3 po – 7,6 cm), le 140A semble plus moderne, plus civilisé aussi. Le risque de passer en pylône paraît donc moindre que sur les versions précédentes. Au Québec, il n’y a qu’un seul Cessna 140A en circulation. Celui-ci (CF-FVO), basé à CYRQ, appartient à Marc-Julien Gauthier. Ce technicien d’Hydro-Québec et pilote privé assidu vole dessus, été (sur roues) comme hiver (sur skis). Acheté en 2007 à une famille gaspésienne, pour la somme de 25 000 $ CA, cet appareil (s/n15691) a conservé partiellement le lustre de sa peinture d’origine. En revanche, l’intérieur – radios incluses – a été complètement restauré. Le résultat est impressionnant : on dirait un cockpit neuf ! Le moteur, un Continental C-90, a lui aussi été refait récemment (chez Aéro Atelier, CSL3). Coût : 17 000 $ CA. Bien qu’il n’ait aucunement l’intention de s’en séparer, M. Gauthier évalue son aéronef à 30 000 $ CA. Personnellement, en regard de son peu d’heures de vol (± 2 000) et à la lueur des petites annonces consultées sur Trade-A-Plane et Controller, je dirais qu’il vaut au moins 5 000 dollars canadiens additionnels. D’autant plus qu’il est équipé de portes vitrées Patroller. Effectivement, le moindre 140 régulier s’affiche déjà aux alentours de 22 000 $ US. Pour s’offrir un 140A, comptez jusqu’à 55 000 $ US (tel que vu sur www.aircraftdealer.com, pour un exemplaire datant de 1950, temps cellule : 875 heures). En fait, les offres demeurent rares pour ce classique. À titre indicatif, lors de sa commercialisation (1949), ce sympathique coucou, en version de base, se détaillait 3 695 $ US – soit l’équivalent de 37 000 dollars actuels. En tout, 525 exemplaires auraient été construits et livrés. La plupart d’entre eux sont encore en service.

Train classique avant à lame d’acier et roulette de queue asservie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Qui fut le premier ?

Le Cessna 140 s’est décliné dans la version A décrite plus haut, mais aussi dans le modèle 120. Et non l’inverse, comme beaucoup de gens le croient ! En effet, le Cessna 120 est une émulation économique du 140. Sorti simultanément, celui-ci partageait la même voilure entoilée et doublement haubanée, ainsi qu’un Continental développant 85 ch. Par contre, il ne possédait pas de volets. Les hublots arrière en D, la batterie, le démarreur et les radios demeuraient quant à eux optionnels. Son prix à l’époque ? 2 695 $ US (±  27 000 $ US actuels). Pas cher pour une machine de cet acabit ! L’aviation, il y a 68 ans, était plus accessible, voire carrément populaire. Aujourd’hui, à ce tarif-là, on s’offre à peine un ultraléger en tubes et toile, et équipé d’un maigre Rotax 503…

C-FJAR appartenant à Martin Tanguay ou le profil indémodable du Cessna 140 !
Photo: Collection Martin Tanguay

Fiable et modulable

Quatre-cylindres Continental C-90 et bipale McCauley à pas fixe

Peu de consignes de navigabilité récentes impactent le Cessna 140. L’une des dernières en date consistait en l’installation de harnais de sécurité. Celle-ci, du reste, ne concernait pas uniquement les 120 et les 140, mais bien toute la gamme des anciens Cessna. Par ailleurs, on notera la possibilité d’équiper ces modèles de moteurs plus puissants (jusqu’à 135 ch sous STC). Certains Cessna 140 ont aussi été convertis – Ô sacrilège ! – en monomoteurs à train tricycle. Plus sérieusement, on appréciera l’échange de la bipale de bois originale contre une McCauley en alliage léger. Cette option, proposée par l’avionneur du Kansas, coûtait alors : 70 $ US (± 700 $ US actuels).

Juste héritage

À l’époque, Cessna comparait la finition et le confort des cabines de ses 140, 170 et 195 à ceux des avions de ligne contemporains. On comprend pourquoi !

Sorti deux ans plus tard, soit en 1948, le Cessna 170 est considéré comme une version quadriplace vitaminée du Cessna 140. Sa production s’étendra jusqu’au milieu des années 1950. Viendra ensuite le fameux C172 (1955), conçu pour satisfaire une nouvelle génération de pilotes – celle ne jurant que par un train tricycle ! O tempora, O mores. D’autre part, l’arrêt de la production du 140A, en 1951, ne correspondra pas immédiatement avec l’avènement du Cessna 150. En effet, il faudra attendre 1958 pour que cet autre avion démocratique sorte des chaînes du constructeur. Une chose demeure certaine : c’est bel et bien le Cessna 140 qui a contribué à la réussite initiale de Cessna. Sans lui, qui sait à quoi ressemblerait l’aviation de loisirs aujourd’hui ? En terminant, sachez que l’International Cessna 120-140 Association (https://www.cessna120-140.org/) regroupe les fanas de ces deux classiques. C’est Martin Tanguay, propriétaire d’un beau Cessna 140, année 1946 (C-FJAR), basé au Québec, qui représente ce club au Canada. N’hésitez pas à le contacter pour plus d’information !

 

 

 

 

Texte et photos : Richard Saint-George

 

Devinettes sur le Cessna 140 et dérivés

a)      L’hélice du modèle 140A est-elle à pas fixe ou variable ?

b)      Quel est le TBO du moteur Continental C90 ?

c)      Comment s’appelle la version du 140 munie de réservoirs de 42 gal, d’un tube lance messages dans le plancher et de portes en plexiglas ?

 

 

Réponses : a) fixe   b) 1 800 heures   c) Patroller

 

Cessna 140A… en quelques chiffres

 

Envergure : 33 pi 4 po (10,16 m)

Longueur : 21 pi 6 po (6,55 m)

Hauteur : 6 pi 3¾ po (1,92 m)

Places : 2

Masse à vide : 900 lb (408 kg)

Masse maximale au décollage : 1500 lb (680 kg)

Moteur : Continental C-90

Puissance : 90 ch @ 2625 tr/min

Hélice : bipale McCauley CM7152 ¤ 71 po (1,80 m)

Réservoirs : 2 x 12,5 gal (2 x 47,5 l)

Vitesse maximale (Vne) : 140 mph (122 kias – 225 km/h)

Vitesse de croisière @ 2 300 tr/min : 110 mph (96 kias – 177 km/h)

Vitesse de décrochage, pleins volets : 30 mph (26 kias – 48 km/h)

Distance franchissable maximale : 450 mi (391 nm – 724 km)

Plafond pratique : 15 600 pi (4755 m)

 

 

 

BDV

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Marc-Julien Gauthier aux commandes de son splendide Cessna 140A, immatriculé CF-FVO (année 1951), basé à CYRQ.

 

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Photo d’ouverture d’article

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C-FJAR appartenant à Martin Tanguay ou le profil indémodable du Cessna 140 !
(photo Martin Tanguay).

 

DSC_3670 + DSC_3672 (à mettre ensemble dans le même format) –

Train classique avant à lame d’acier et roulette de queue asservie

 

DSC_3677 + DSC_3680 (à mettre ensemble dans le même format) –

Quatre-cylindres Continental C-90 et bipale McCauley à pas fixe

 

DSC_3682 –

À l’époque, Cessna comparait la finition et le confort des cabines de ses 140, 170 et 195 à ceux des avions de ligne contemporains. On comprend pourquoi !