Par Pierre Lapprand
Lorsque vous arrivez à l’aéroport de Victoria, en Colombie-Britannique, vous foulez le sol d’un lieu historique de l’aviation canadienne. Appelé à l’origine le Patricia Bay Airport, cet aérodrome en fonction dès 1939 était le troisième en importance au Canada et vibrait au son des Curtiss P-40, Hawker Hurricane, de Havilland Mosquito et bien d’autres warbirds.
Dix mille personnels militaires sont passés par là; 3500 personnes pouvaient être enrôlées en même temps dans ce lieu qui fut l’un des « aérodromes de la démocratie » qui faisaient sa part pour le plan d’entraînement aérien du Commonwealth britannique (PEACB) mis en place au début de la Deuxième Guerre mondiale. De mai 1940 à mars 1945, ce plan, conçu pour former des pilotes, navigateurs, bombardiers, opérateurs radio, mitrailleurs, mécaniciens de bord et équipages au sol, a accueilli, au total, 210 000 étudiants, dont 72 835 Canadiens; 49 707 pilotes y ont reçu leurs ailes. D’abord prévu pour la formation, le Patricia Bay Airport allait vite être occupé par trois groupes qui allaient utiliser ses pistes et sa tour de contrôle. Au camp de l’Ouest se rassemblèrent le 3e escadron d’entraînement opérationnel (OTU nº 3) de l’Aviation royale canadienne (ARC) et des escadrons de chasse et de bombardement. Au camp de l’Est, c’était l’OTU nº 32 qui accueillait des Anglais, des Australiens et des Néo-Zélandais. Et enfin, la base aéronavale, stratégiquement bien placée pour la patrouille côtière, qui faisait partie du Western Defense Command américain pour la lutte aux sous-marins japonais. En 1948, Transports Canada prit le contrôle de l’aéroport. En 1959, il prit le nom de Victoria International Airport. Aujourd’hui, le site regorge d’activités, avec des liaisons aériennes de passagers et de fret, des hangars de maintenance (où l’an dernier un de Havilland Mosquito a été restauré par la Victoria Air Maintenance LTD), une école de pilotage, une station météo et l’escadron 443 de la Marine royale canadienne actuellement équipé de six hélicoptères CH-124 Sea-King. Le site est maintenant l’hôte d’un beau musée d’aviation situé dans l’ancien camp de l’Est, le British Columbia Aviation Museum (BCAM).
Le BCAM
L’extérieur du musée est sobre et élégant, mais ce qui vous attend à l’intérieur est plein de vibrantes surprises! Il y a d’abord l’accueil chaleureux à l’entrée, où vous attend un bénévole pour vous offrir une visite guidée. Ensuite, c’est la découverte de l’harmonieuse exposition d’avions dont on apprécie la proximité. On en compte plus de vingt. Il y a aussi une belle collection de moteurs et de pièces, plus quelques raretés valant à elles seules la visite. Je pense, par exemple, à l’exposition des restes d’un authentique ballon incendiaire japonais dont je mentionnais déjà l’existence dans un article en juillet-août 2012. Une centaine de bénévoles donnent vie à ce musée dédié à la préservation de l’héritage de notre aviation canadienne, avec naturellement un enclin local pour l’aviation de brousse et la lutte contre les feux de forêt. La visite se déroule dans trois hangars, dont le premier et principal contient des avions dont la restauration est complétée. On y trouve, entre autres, une réplique d’un bimoteur Bristol Bolingbroke MK IV. Le deuxième, le hangar Henderson, complété en 2010, abrite un Vickers Viscount, qui fut le 1er avion de ligne à moteurs turbopropulsés au monde. Celui-ci était au service de la Trans-Canada Airlines en 1957. Le guide vous amènera dans le hangar de restauration qui sent bon… la restauration (peinture, colle, enduit, etc.)! On se sent d’ailleurs privilégié d’y découvrir les prochaines primeurs du musée! Et finalement, le fleuron de la visite est la pièce réservée à l’histoire de l’aérodrome pendant la Deuxième Guerre mondiale, présentant des photographies, des documents et des uniformes de l’époque. Voici en quelques photos un aperçu du musée.
Le BCAM possède une bibliothèque et des archives contenant plus de 6000 documents. Pour consulter la liste complète de ses avions, rendez-vous sur son excellent site web http://www.bcam.net/, très révélateur de son dynamisme, mais aussi de son humour, quand on lit par exemple que le neuvième avantage d’être membre du BCAM est… d’avoir du fun! Merci BCAM!