En octobre 2016, Continental Motors® Aircraft Engine a émis le bulletin de service SB16-6. Encore valide, celui-ci nous permet d’identifier les causes possibles d’un kickback et détaille, à l’attention des mécaniciens, les procédures d’inspection.

Six-cylindres Continental IO-520-D monté sur Cessna 185, en révision chez Aéro Atelier (CSL3).

Sur les gros moteurs, un démarrage raté peut engendrer un retour de démarreur – se traduisant visuellement par un demi-tour (voire un peu plus) de rotation inverse de l’hélice. Ce phénomène peut générer des dommages au niveau des pignons et hypothéquer gravement la mécanique. Il semble donc important d’identifier rapidement le problème, d’en traiter la cause et de diagnostiquer les dégâts éventuels.

La manifestation

Dans le bulletin référencé SB16-6, Continental Motors définit un engine kickback comme un brusque arrêt de la rotation du moteur ou une inversion lorsque le démarreur est actionné. En clair, cela signifie que le démarreur et le moteur forcent brusquement l’un contre l’autre. Cet antagonisme interne se reflète à l’extérieur par un violent contrecoup de l’hélice, voire une brève contre-rotation. L’incident peut être silencieux ou bruyant (résonance de métaux se percutant) mais ne doit, en aucun cas, être sous-estimé par le pilote ou toute autre personne aux commandes.

Les raisons possibles

Tout comme sur n’importe quel moteur thermique (auto, moto, bateau, etc.), plusieurs causes peuvent engendrer un retour de vilebrequin sur un six-cylindres aéro :

  • Dérèglement de l’avance à l’allumage.
  • Contacteur de magnéto mal positionné, notamment sur bimoteur car absence de clé au profit d’interrupteurs à bascule.
  • Pluie d’étincelles ou shower of sparks déficiente due à des connexions erronées sur les magnétos ou encore à une mauvaise mise à la masse de la magnéto droite.
  • Défectuosité du couplage à l’impulsion d’une magnéto.
  • Amorçage impropre du carburant ou un ajustement inexact de la manette des gaz.
  • Batterie déchargée ne suffisant pas à entraîner correctement le démarreur (basse vitesse).
  • Excès du temps imparti du cycle de démarrage entraînant un ralentissement du démarreur.
  • Résistance excessive des conducteurs dans le circuit électrique.

Six-cylindres Continental IO-550-G Gold couplé à une tripale Hartzell scimitar, équipant un Mooney Ovation 3.

Les risques inhérents

A priori, pour qui n’est pas féru de mécanique, un retour d’hélice peut sembler anodin. Surtout si, au deuxième voire troisième essai, le moteur démarre puis ronfle normalement. Pourtant, sans le savoir, des dommages irréversibles internes peuvent être advenus. En l’occurrence, les gros cubes Continental comportent de puissants engrenages pouvant se voir fragilisés à la suite d’un fonctionnement inadéquat. Aussi, pour pallier au fort taux de compression desdits moteurs, chaque démarreur n’est pas directement appareillé au vilebrequin. Ainsi, le pignon du démarreur entraîne le pignon d’un starter adapter ou starter clutch qui lui-même entraîne le pignon du vilebrequin. Ce dispositif intermédiaire sert d’amortisseur de couple et d’embrayage à la fois. Toutefois, celui-ci n’étant pas conçu pour virer à contresens, son ressort interne peut se casser lorsque tournant incorrectement. Par ailleurs, une ou plusieurs des 6 vis du pignon de vilebrequin peuvent se détériorer, voire céder, suite à un tel à-coup. Plus grave encore, une dent dudit pignon risque de se briser lors du choc. Cette avarie n’entraînera pas forcément l’arrêt du moteur. Par contre, si un autre engine kickback se produit ultérieurement, une seconde dent pourrait sauter. Privé d’entraînement primaire, le pignon de l’arbre à cames ne commandera alors plus la distribution. Dans ce cas, le six-cylindres ne pourra tout simplement pas démarrer. Pire, si la dent casse en vol, la mécanique s’arrêtera subitement ! Avec les conséquences que l’on peut imaginer : destruction de pistons, soupapes, etc. Le tout suivi d’un atterrissage d’urgence…

Inspections et réparations

Bien que plusieurs variantes existent sur les moteurs Continental, un principe de précaution prévaut. En cas de problème ou de doute, le diagnostic d’un mécanicien motoriste demeure primordial. En fonction du type d’appareil et de sa configuration moteur, l’examen du démarreur et de ses corollaires requerra plus ou moins de temps. Plus la cloison pare-feu est rapprochée, plus l’intervention sera longue (de 3 à 8 heures, voire davantage si agencement complexe). En terminant, Aéro Atelier précise que ce risque d’avaries ne concerne que les moteurs Continental IO-520-B, BA, BB, C, CB, M, MB; TSIO-520-B, BB, BE, D, DB, E, EB, J, JB, K, KB, L, LB, N, NB, UB, VB, WB; IO-550-A, B, C, G, N, P, R; TSIO-550-B, C, E, G, K, N et TSIOL-550-A, B, C. Les Lycoming et autres Franklin ne sont pas affectés car leurs démarreurs fonctionnent via un solénoïde.

 

Chronique proposée par Richard Saint-George, en collaboration avec Aéro Atelier