Par John McKenna

Sérieux problème pour les petits transporteurs depuis au moins cinq ans et qui afflige maintenant l’ensemble des industries canadienne et mondiale du transport aérien, la pénurie de pilotes est en croissance fulgurante et ne sera pas résolue par une vision à court terme et des solutions temporaires.

L’industrie du transport aérien du Canada explore de nombreuses pistes de solutions et cherche des façons novatrices pour attirer une nouvelle cohorte de pilotes. Malheureusement, il n’y aura pas de solutions faciles à ce problème causé principalement par une conjoncture qui est à la fois systémique et économique.

Systémique car lorsque les gros transporteurs ont besoin d’un nombre accru de pilotes, l’effet de vague augmente et déferle vers les plus petits transporteurs. La situation s’illustre par la juxtaposition de deux triangles. L’un avec la pointe vers le haut, la base représentant le grand nombre de petits transporteurs, la pointe illustrant le petit nombre de gros transporteurs. L’autre triangle, inversé avec la pointe vers le bas, représente le nombre relatif de pilotes employés à chaque niveau de l’industrie, avec l’importante demande des plus gros transporteurs étant représentée par la ligne du haut. Bien qu’il y ait beaucoup plus de petits transporteurs au Canada, le plus grand nombre de pilotes requis par les quelques très gros transporteurs exerce une pression énorme chez les transporteurs de niveaux inférieurs. En 2017, Transports Canada a émis 1273 licences de pilote professionnel, dont 49 % à des étudiants étrangers qui sont en grande majorité retournés dans leurs pays. Malgré quelque 650 nouveaux pilotes canadiens, l’écart actuel entre la demande et l’offre de pilotes au Canada se chiffre à environ 500 par année et continue de croître.

Deux choses sont essentielles pour surmonter cette situation. La première est de réussir à attirer plus de jeunes et de femmes vers une carrière en aviation. L’autre est de mieux gérer la transition des pilotes en provenance des petits transporteurs vers les plus gros de façon à réduire l’impact chez les plus petits.

Du point de vue économique, la demande de pilotes mondiale grandissante générée par la croissance annuelle du trafic d’environ 5 % est aggravée par le fait qu’une importante cohorte de pilotes se dirigent rapidement vers la retraite. Que ce problème soit mondial ajoute à la situation canadienne, car les exploitants étrangers ciblent les pilotes canadiens d’expérience, augmentant ainsi la pression du côté de la demande canadienne.

L’élasticité positive de la demande dans le transport aérien fait en sorte que la croissance économique entraîne une forte augmentation de la demande tandis qu’une récession réduit de façon marquée la demande et, par conséquent, le nombre de pilotes requis. La grave récession de 2008 a découragé de nombreux jeunes à s’orienter du côté de l’industrie du transport aérien puisque les manchettes parlaient surtout de licenciements et de périodes difficiles pour de nombreux transporteurs. Cette lacune a créé un fossé encore plus grand de l’offre devant la demande qui a bondi quelques années plus tard.

Le coût élevé de la formation est une dissuasion financière sérieuse qui n’est pas facilement résolue. La formation est continue et coûteuse pour un transporteur, ce qui explique en grande partie les conditions offertes aux nouveaux pilotes par rapport à des emplois dans d’autres secteurs de l’économie.

L’année dernière, l’ATAC a créé un groupe de travail pour étudier cette situation critique. Son mandat est de :

  • développer des outils modernes pour inciter les jeunes à envisager une carrière en aviation;
  • faire appel aux femmes pour qu’elles deviennent pilotes;
  • trouver de l’aide financière pour former les futurs pilotes; et,
  • construire de meilleurs ponts entre les plus grands et les plus petits transporteurs pour assurer une transition plus fluide des pilotes.

L’accomplissement de ces tâches aiderait beaucoup à atténuer ce problème. Malheureusement, attirer plus de gens dans le domaine de l’aviation est un défi à long terme.

Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent aussi s’impliquer au-delà du simple fait de reconnaître le problème. D’abord et avant tout, les gouvernements doivent considérer la pénurie croissante dans cette industrie clé dans tout nouveau règlement. Deuxièmement, ils doivent travailler avec l’industrie pour trouver des solutions permanentes. Les gouvernements ont les ressources requises pour aider à développer les outils financiers nécessaires pour attirer les gens vers l’aviation. Les gouvernements provinciaux doivent aussi aider en ajoutant l’aviation aux programmes d’orientation professionnelle et à mieux informer les conseillers des possibilités offertes par une carrière dans le secteur de l’aviation.

Cette initiative ne se limite pas aux membres de l’ATAC, car seul un dialogue global avec toutes les parties prenantes mènera à des solutions viables à long terme. Le groupe de travail concentre actuellement ses efforts sur la pénurie de pilotes, mais souhaite également remédier à d’autres pénuries de personnel dans le secteur de l’industrie du transport aérien.

L’ATAC invite toutes les parties intéressées à se joindre aux efforts du groupe de travail.