Sable, terre, débris végétaux, mais aussi vis, écrous, rondelles souillent régulièrement les tapis. Sournoisement, ces rebuts finissent par s’infiltrer dans la structure du double plancher.  À la longue, cela peut engendrer des points de friction et détériorer certains mécanismes internes. Une inspection régulière, doublée d’une bonne prévention, évitera bien des désagréments.

Les planchers des avions et de surcroît des hydravions récoltent toutes sortes de saletés. Pilotes et passagers embarquent, collés à leurs souliers et à leurs bottes, de la terre et surtout du sable. Ce dernier – matériau granulaire – imprègne les revêtements puis pénètre dans les doubles planchers – justement là où passent tringleries, câbles et poulies. En collant à la graisse, voire à l’huile, parfois inopportunément badigeonnée sur les transmissions, limons et graviers se transforment en de redoutables abrasifs.

Exemple de contamination d’un sous-plancher.

Causes et effets

On dit que le poids d’un avion augmente toujours avec les années. Outre l’équipement additionnel embarqué et parfois des restes de peinture mal décapée, sable, terre, eau (glace en hiver) et objets égarés finissent par peser sur la structure mais aussi par hypothéquer le fonctionnement des chaînes, câbles et tringles. Ainsi, les pièces de monnaie, stylos et autres bricoles perdus dans les méandres des conduits et trous des planchers risquent de provoquer un blocage partiel des commandes. En cas de fortes turbulences ou lors de manœuvres extrêmes, le déplacement intempestif d’un objet – demeuré longtemps passif – peut alors entraver le contrôle d’un appareil. Plus sournoisement, le sable s’infiltrant dans les interstices imprègne inexorablement guignols et poulies. Ces dernières, et plus particulièrement celles montées à l’horizontale, deviennent alors bruyantes et/ou fonctionnent par à-coups (course saccadée). Comme les poulies en bakélite d’aujourd’hui sont moins résistantes qu’autrefois, leur détérioration paraît exponentielle. Précisons que leur roulement est scellé et irremplaçable. Et même si le prix unitaire d’une poulie courante de Cessna ou de Piper demeure peu dispendieux, la main-d’œuvre pour son remplacement peut se chiffrer assez haut. En fonction de l’emplacement, dépose, repose et réglage requièrent souvent plusieurs heures d’ouvrage.

Poulie en bakélite, diamètre 4 po (10 cm), articulant volets et ailerons de monomoteurs Cessna.

Nettoyage des planchers

Au moins une fois par an, il est conseillé de déposer les sièges puis d’enlever le revêtement de sol (moquette, tapis de caoutchouc, etc.) afin de passer soigneusement l’aspirateur sur la structure nue. L’ouverture subséquente des trappes permettra de vérifier la souillure des sections du double plancher dévoilé, des cloisonnages et des divers passages. Généralement, si du sable ou de la terre se sont déposés par endroits, un bon dépoussiérage complété par un essuyage minutieux des mécanismes suffira. Dans de rares cas de contamination maximale, un lavage à haute pression pourrait s’imposer. Cette opération exigerait alors la dépose générale des transmissions. À nouveau, on procédera au contrôle des poulies – tel que démontré dans le manuel AC43.13-1b (chapitre 7, page 38, figures 7 – 20). De surcroît, si le remplacement de câbles s’avère nécessaire, favoriser des modèles en acier inoxydable. Différentes méthodes de graissage, exposées dans le même chapitre de l’AC 43.13, garantissent un fonctionnement adéquat tout en évitant que lesdits câbles deviennent poisseux. Enfin, au remontage mais également lors de tout examen, s’assurer que les alignements et les tensions soient corrects.  Rappelons que ces opérations n’entrent pas dans le cadre des Travaux élémentaires, listés par Transports Canada dans le RAC, Partie VI, Norme 625, Appendice A. Toute intervention doit donc être exécutée par un technicien d’entretien d’aéronefs (TEA).

Louis Blanchard, pilote chez Air Tamarac, dépose, sous la supervision d’un mécanicien d’Aviation B.L., une trappe de plancher à des fins d’inspection.

Prévention et protection

Comme le précise Luc Gagnon – gérant du département maintenance chez Aviation B.L. – seuls les doubles planchers sont concernés par ce type de contamination. Les ailes et les empennages ne souffrent pas d’imprégnation de sable… sauf peut-être en Arabie saoudite ou dans toute autre contrée désertique ! Pour se prémunir d’accumulations, la première chose à faire est de secouer ses chaussures/bottes avant de monter à bord. Y compris celles des enfants invités ! Un brossage sommaire du chien « pax occasionnel » plus un rinçage rapide de ses pattes ne sera pas superflu. D’autre part, les mécaniciens recommandent de recouvrir le pourtour des trappes d’accès avec du ruban adhésif métallique. Économique, facile à poser et à enlever, ce type de Scotch Tape empêchera la saleté de s’infiltrer. En amont, un dépoussiérage régulier (voire un décrassage programmé) des tapis demeure impératif.  Enfin, en privilégiant des tapis synthétiques lisses au lieu de moquette, on évitera l’incrustation de matériaux granulés tout en facilitant le nettoyage. Quant aux objets égarés ou tombés par terre, en vol, ne pas les oublier sous prétexte que l’on ne les voit plus au retour ! Un crayon mal placé peut faire aussi des dégâts…

Isolation des trappes d’un Cessna 180A avec du ruban adhésif métallique.

 

Chronique proposée par Richard Saint-George, en collaboration avec Aviation B.L.