Le développement dans les années soixante du système de navigation à l’aide de radio- balises aura permis à l’aviation de faire un bond considérable en matière de sécurité et de précision du vol. Mais de nos jours, les compagnies aériennes les utilisent de moins en moins et se fient de plus en plus à la très grande précision de la navigation par satellite. De plus, la convivialité et la simplicité d’utilisation du GPS (RNAV) en font l’aide à la navigation de premier choix des pilotes. À cela s’ajoute le fait que l’utilisation de plus en plus fréquente de la navigation basée sur la performance, qui repose sur le satellite, peut créer des conflits entre les aéronefs qui l’utilisent et ceux qui sont encore à la radionavigation dans les zones à forte densité de trafic.
C’est dans ce contexte que NAV CANADA a entrepris son programme de modernisation des Navaids qui, éventuellement, mènera à la mise hors service d’un certain nombre de NDB et VOR. Il est important de souligner que tous les ILS seront maintenus, qu’en régions éloignées et aux aéroports qui n’ont pas ILS, les NDB et VOR seront maintenus afin de garantir un service de navigation en cas de panne du système satellite.
Le plan de relève de NAV CANADA prévoit qu’en cas de panne complète du système satellite qu’il sera possible de se servir des radars comme moyen de navigation. Le tableau ci-dessous montre le schéma de couverture radar du Canada.
Comme le démontre le schéma, dans la partie sud du Canada, la couverture radar à 10 000 mille pieds d’altitude est presque complète. Pour la partie plus au nord, les trous de couverture dépassent rarement 100 milles nautiques. En cas de panne, les contrôleurs aériens pourraient donner des vecteurs radars aux équipages les menant directement vers l’ILS, le VOR ou le NDB de l’aéroport de destination. Là où il y a des trous de couverture, les aéronefs recevraient l’instruction de continuer de naviguer à l’estime jusqu’à la prochaine zone de couverture radar. Pour les avions de ligne de 36 passagers et plus, cette méthode ne causerait pas de problème puisqu’ils sont généralement munis d’une centrale de navigation inertielle. Pour les plus petits avions, comme le King Air ou le PC12, cela représenterait environ 30 minutes de navigation à l’estime tout au plus.
Le plan de relève n’est là qu’en cas de problème, surtout que le système GPS n’a encore jamais fait défaut. Les opérateurs, eux, devront travailler avec la navigation RNAV tous les jours et cela aura obligatoirement des impacts sur leurs exploitations. Un des principes importants qui guide NAV CANADA pour la mise en œuvre du plan de modernisation des Navaids est que cela doit se faire en utilisant la réglementation actuelle. Pour les exploitants, la principale conséquence de ce plan sera l’obligation pour tous les aéronefs qui voleront selon les règles de vol aux instruments d’être munis d’un dispositif de navigation par satellite (ce qui est déjà le cas de 90 % des aéronefs en vol IFR). Selon NAV CANADA, bien que la réglementation autorise l’utilisation des constellations de satellites GPS et GLONASS, seul le système GPS possède les récepteurs certifiés pouvant être utilisés dans les aéronefs au Canada. Les appareils GPS actuellement installés à bord des avions qui répondent à la réglementation seront suffisants et il ne sera pas nécessaire de les remplacer. Bref, ne jetez pas vos Garmin 430 ou 530 à la poubelle, car ils seront encore utiles.
Avant d’aller plus loin, il est important de préciser que le plan de modernisation des Navaids n’a aucun lien avec l’implantation éventuelle de l’ADS-B, puisque cela relève de Transports Canada et cette décision lui appartient. Par contre, peu importe la décision que prendra Transports Canada, le plan de modernisation des Navaids, lui, peut aller de l’avant.
Pour avoir une meilleure idée du nombre d’aides à la navigation qui pourraient être mises hors service, NAVCANADA a déjà mené une première étude et le résultat est représenté sur les deux tableaux suivants
Comme le démontrent les deux tableaux, le nombre de Navaids qui pourraient être mis hors service est tout de même considérable. Les économies qu’engendreraient ces fermetures finiraient par avoir un impact sur les frais que NAV CANADA demande aux propriétaires et opérateurs d’aéronefs.
Puisque le plan de modernisation des Navaids s’accommodera de la réglementation existante, l’altitude de décision (DA) pourra être de 200 pieds AGL pour une approche LPV, comme c’est le cas actuellement. Pour ce faire, l’aéroport doit être doté d’une infrastructure spécifique semblable à un système d’atterrissage aux instruments ILS de CAT I. Pour les aéroports et aérodromes, il n’y aura pas de changement dans les plaques d’approches. Par contre, NAV CANADA entend profiter de l’occasion afin de revoir la pertinence de garder toutes les approches différentes à certains aéroports. La question ici est de savoir s’il est vraiment nécessaire pour un aéroport d’avoir à la fois une approche ILS, une NDB, une VOR, une LOC DME, une ARC DME et une LPV. Puisque le plan de modernisation fera évoluer la navigation vers le tout au satellite, la nécessité d’un aussi grand nombre d’approches différentes devient discutable.
NAV CANADA prévoit compléter son étude et faire ses recommandations à Transports Canada d’ici la fin de l’année et la mise en œuvre du plan de modernisation des Navaids prendrait de cinq à sept ans. Les changements se feront de façon progressive et, au bout du compte, ils devraient permettre aux opérateurs de faire des économies de carburant et de temps de vol, alors que la formation des pilotes n’aura pas besoin d’être modifiée. Alors que le LORAN C fait déjà partie du folklore de l’aviation, je peux très bien imaginer que, dans 20 ans, les pilotes plus âgés diront aux plus jeunes : « Dans notre temps c’était bien plus compliqué de naviguer; il fallait apprendre à se servir d’un NDB, ça c’était compliqué! »