Depuis l’an 2000, Transports Canada a prorogé la révision obligatoire des hélices à pas variable de 6 à 10 ans. Cet arrêt ne représente pas forcément une économie, à moyen terme, pour les propriétaires privés ni pour les opérateurs commerciaux. Pire, cela pourrait – dans certains cas – générer indirectement un risque en vol !
Un assemblage précis de pièces complexes compose les hélices à pas variable. Hormis les joints toriques en caoutchouc nitrile ou autres élastomères, la majorité des systèmes fixes et mobiles sont en métal : principalement en alliage d’aluminium et en acier traité. La dissimilitude de ces métaux unis raccordés – lorsque catalysée par un agent extérieur (pluies acides, sel, déjections aviaires, etc.), lors d’arrêts plus ou moins longs – peut engendrer des amorces de corrosion. Sachant également que les différents plaquages et divers traitements – protégeant nombre d’éléments – ont, en conditions optimales, une durée de vie moyenne de 6 ans, il peut sembler atterrant de prolonger de 4 ans leur résistance. Toutefois, cette inquiétude ne touche pas vraiment les avions commerciaux, ceux-ci dépassant bien souvent la butée horaire définie par l’hélicier, en fonction du type (de 1500 heures pour certaines séries anciennes à parfois 4000 heures pour quelques modèles montés sur turbines). En effet, la loi stipule que c’est la première limite atteinte qui prime : butée calendaire ou butée horaire (ex. : 10 ans ou 2400 heures).
Prévention, détection et risques
Considérant que c’est surtout au stationnement que les hélices subissent les assauts du climat et de la pollution, il conviendra de les protéger au mieux. L’utilisation de housses spécifiques constitue la meilleure option lorsque l’appareil est parqué dehors. Lors d’escales courtes et en l’absence de protecteurs adéquats, on recommande de mettre les bipales en position horizontale. Sur les tripales, privilégier un agencement en Y. Quant aux quadripales, bien que plus rares, les mettre en X et non en +. Dans tous les cas, avant de redécoller, s’assurer qu’aucune souillure n’entache les jonctions de pales. Si un nettoyage s’avère nécessaire, laver l’ensemble à l’eau claire. De préférence sans savon ou avec une solution aqueuse ayant un pH faible, voire neutre. Rappelons que l’acidité d’un liquide (plus ou moins détersif), en pénétrant par des jointures affaiblies ou carrément défectueuses, peut agir comme de l’électrolyte et favoriser ainsi l’apparition de corrosion sur les mécanismes de rotation des pales. Une fois amorcé, ce processus est insidieux. Un pied de pale corrodé peut finir par se rompre en vol. Une pale détruite engendrera un balourd, entraînant un déséquilibre suivi de vibrations extrêmes. Le tout menant, dans la foulée, à l’arrachage du bâti-moteur. On devinera aisément l’épilogue des événements…
Examen et point de vue
Aux yeux d’un profane, la détérioration du dural peut sembler infime. En effet, la corrosion par piqûres (ou de type pitting) est généralement de la taille d’une lentille ou moins. Néanmoins, et comme nous l’avons évoqué plus haut, les conséquences peuvent s’avérer graves, voire fatales. Dans ce sens et au-delà des inspections visuelles courantes, il paraît évident qu’une révision périodique soit respectée. Plus encore, qu’elle ne soit pas abrogée comme le souhaiterait la COPA ! À l’instar de la réglementation américaine – soit une butée de 6 ans sur les avions commerciaux et aucune limite calendaire sur les aéronefs privés –, la Canadian Owners and Pilots Association veut faire tomber la restriction calendaire (déjà étirée de 4 ans depuis 2000) sur les machines appartenant à des particuliers. Sottise, aux dires des professionnels ! Jean-Guy Bernier, gérant du département hélices, chez aviation B.L., s’insurge lui aussi contre cette proposition faite à Transports Canada. Selon lui, ses collègues et ses compétiteurs, en modifiant la législation, on ne fera pas économiser de l’argent aux pilotes propriétaires. Au contraire ! La détection de corrosion, si elle est prise à temps, peut être annihilée. Souvent, après dépose et démontage, un simple ponçage doux suffit à réduire une amorce de piqûre. En revanche, lorsque trop avancée, une détérioration du métal ne peut conduire qu’au remplacement de la pièce incriminée. À titre indicatif, une pale McCauley 90DHB-8 (montée sur Cessna C182 RG) coûte actuellement : 4 465 $ US. (hors taxes + montage + révision de ladite hélice, soit environ 2 700 $ CA). Un « pensez-y bien » !